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jeudi 18 octobre 2018

Jean Momo

Il était une fois Jean Momo, 
ou une histoire qui reste à inventer.

Nombreux sont ceux qui pensent que leurs noms de famille trouvent leur origine dans l’état-civil français d’Algérie, sur la forme et même sur le fond. Pourtant, la toponymie locale est demeurée intacte globalement, sans empreinte de francisation vraiment durable. Personne, même pas les franchouillards ou les esprits serviles du bled, n’a jusque-là revendiqué ou parlé d’une origine française des prénoms des « indigènes », car tout simplement, là, le mensonge aurait été trop grossier au vu des référents religieux différents des uns et des autres.  Chose curieuse, le Français faisait du 50-50 en la matière mais jamais il n’a composé l’identité entière de l’indigène en un seul lieu, sur un même registre (écrit vs oral) : le Français aurait donné un nom patronymique à l’indigène au bled et baptisait volontiers l’indigène lorsque ce dernier venait en France (pour travailler, généralement), histoire d’avoir un prénom plus commode à l’usage, voire même un sobriquet. Pour autant, est-ce que vraiment tout parallèle (entre prénoms français et kabyles, par exemple) est exclu en la matière ? Aussi étrange que cela puisse paraître, il y aurait bel et bien des rapprochements légitimes entre les deux, et l’origine de cette étrange similitude remonte assurément à des temps très anciens, il serait plus légitime de substituer le latin au français dans ce cas…


Je n’ai pas de réponse à cette question, cependant une corrélation frappante que voici nous manquerait pas de susciter la curiosité de ceux qui arrivent à concevoir la Méditerranée dans toute sa dimension et composer avec ses deux rives et sa longue histoire. Voici le tableau de quelques prénoms composés, avec une comparaison prénoms français vs kabyles parmi les plus populaires : 



Kab.
Fr.
Mohand-Akli (Moh’dh’Akli)
Mohand-Ali ?
Mohand-Amar ?
Mohand-Améziane (Moh’dh’Améziane)
Mohand-Amokrane (Moh’dh’Amuqran)
Mohand-Arav
Mohand-Arezki (Moh’dh’Arezki)
Mohand-Chérif (Moh’Chrif)
Mohand-Idir (Moh’dh’Idhir)
Mohand-Saïd (Moh’Seyd)

Jean-Charles (Juan Carlos, esp.)
Jean-Baptiste
Jean-Claude
Jean-François
Jean-Jacques
Jean-Louis
Jean-Luc
Jean-Marc
Jean-Marie
Jean-Michel
Jean-Paul
Jean-Pierre

NB : Le prénom emblématique Mohand, kabyle surtout mais existant au Rif aussi, ne serait pas forcément une variété du prénom arabe Mohamed, et M’Hend en kabyle ne remplace pas Mohand à tous les coups.

On ne peut exclure que Mohand le Kabyle (Momo quoi !) serait l’équivalent et alter ego de Jean le Français, au vu de leur place dans les prénoms composés. Ainsi, Mohand-Akli (Mohdhakli en kabyle familier) serait peut-être bien l’équivalent de Jean-Claude ou Jean-Charles. L’idéal est d’aller chercher la variante latine du prénom français. Mais d’où viendrait cette corrélation, si elle venait à être corroborée par des exemples bien fondés ? Un fond religieux et/ou administratif commun ou proche ?

https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/5/55/Ivankupala.jpg
Pour aller plus loin, jusqu’païens, jusqu'à l’Egypte ancienne notamment, une hypothèse mérite notre intérêt : et si le prénom kabyle fabuleux M’Hend-Ouchen (pour le renard/chacal) était l’équivalent de Jean-Baptiste, illustre personnage de l’imaginaire chrétien, et thameghra b’ouchen « la fête/les noces du chacal » pour l’arc-en-ciel (eau+lumière)  aurait un lien avec le baptême de conversion (ou métamorphose) ? Si lien il y a, ce serait sans doute un maillon intermédiaire qui permettrait de localiser le personnage du panthéon égyptien ancien, qui aurait servi de référence par la suite pour échafauder le personnage illustrant le baptême. Par ailleurs, thameghra b’ouchen « la fête/les noces du chacal » pourrait avoir des interférences avec la fête (nuit) de Ivan Kupala chez les Slaves, pour le solstice d'été.  Rien de vraiment sûr, mais ça promet…

A prochainement !