Cendrillon ou Mercury Rising
Nous sommes, en Kabylie, encore loin de comprendre la force des images et tout l’intérêt que leur utilisation représente, notamment pour faciliter l’apprentissage, frapper les esprits, etc. Regardez un peu l’image d’illustration du billet précédent, l’image de la jument de Caligula au Sénat de Rome comme le raconte la légende. Une parabole, et non pas une histoire vraie que l’on ailleurs, dans la mythologie judéo-chrétienne, ici représenté sur un tableau de Rembrandt :
C’est la « Présentation de Jésus au Temple », qui correspond à la fête des chandelles ou Chandeleur. La comparaison de ces deux métaphores, que les dupes abusés par les « marchands de dieux » prennent pour argent comptant, va générer donner naissance à un lien avec une autre histoire, très romantique d’ailleurs.
CAP CARBON
Dans les deux cas, on retient la symbolique de l’image, l’élément dominant : le cheval, la chandelle. Quel lien entre ces deux termes d’une seule et même histoire racontée différemment ? Probablement, mais pour le moment seul un lien tiré par les cheveux (et les chevaux ?) m’apparaît : cette fête de Chandeleur est appelée Srétenié en russe liturgique, proche de Sréda « mercredi » lui-même issu de sréda « milieu », srédny « moyen, du milieu ». Je suppose que ce terme russe SRD de « milieu, mercredi » ou SRT de « chandeleur » s’apparente, d’un côté, et vous allez être surpris !, au kabyle SRD de a-sardhun « le mulet, mule » et surtout au nom antique de la capitale kabyle Vgayeth-Bougie : Saldae ; et de l’autre côté, avec le terme Cierge (synonyme de Chandelles, Bougie) , de Cire du latin cera « cire » : eh bingo ! Vgayerh-Bougie (ex.Saldae) est justement la capitale de la cire d’abeilles, son nom a donné bougie en français ! Le cheval ou la jument serait la mèche, le mulet la cire ? Je suppose que pour la mèche, le terme kabyle correspondant serait a-kuval, un terme clairement proche de caballos, cavalier/cheval mais aussi de QVL de « kabyle », et a-kuval en kabyle moderne désigne « le maïs » (culture importée d’Amérique du Nord récemment) et « chevelure claire » (blonde par ex.). Cela pourrait nous renvoyer à a-kuval = « mèche de cheveux », « cheveux en chignon » ou « queue de cheval », plus appropriée dans notre cas. La bougie kabyle de Bougie en cire d’abeille + poil de mulet pour la mèche « queue de cheval » ? Par ailleurs, ce même produit qui se décline sous trois noms différents : bougie, chandelle, cierge devrait-il être comparé à l’appellation des équidés : mulet, cheval, jument, etc. ?
Je ne sais pour quelle raison, mais on voit mieux les traces des personnages des mythes et contes populaires depuis la baie kabyle de Bougie, depuis le Cap Carbon, surtout depuis que l’on a compris que Vgayeth-Bougie était l’Alexandrie kabyle. Voyez-vous, la bougie ou plutôt la chandelle, c’est aussi un conte de fée, très romantique : le conte de Cendrillon. Oui, le nom de cette héroïne et son histoire renvoient à la « cendre » et à la « sandale » (on aurait tendance à pense à un « fer à cheval » plutôt qu’à la « queue de cheval »). Mais en réalité, je pense que cette histoire nous raconte un événement astronomique bien précis : le lever de la planète brûlante (d’où la cendre) Mercure ou plus exactement le moment très bref (un moment de chance, de bonne fortune ?) où apparaît Mercure dans le ciel avant le lever du Soleil. Et ce moment de « Cendrillon », de la planète Mercure est reflété dans la toponymie et les traditions du pays Kabyle comme on le verra plus loin. C’est la planète Mercure la chandelle et le Cendrillon. NB : Le nom grec de cette planète ‘Ermès (Hermès, message des dieux et donneur de chance) serait effectivement en lien avec le kabyle alemas « le milieu », a-lemas « milieu », a-mas « lombes/milieu du corps » probablement en lien avec thi-mès « le feu » en kab.
Le terme tha-shuma3-ath en kab pour designer la bougie serait un emprunt au masri/arabe shum3a, il faudrait aller ses origines en Egypte ancienne, dans le nom de la déesse Maat par exemple. La bougie pourrait ainsi symboliser le rassemblement, l’Union et la Nation, la Ouma en masri/arabe (lien avec le nom de Maat ?) ; et le nom Yemma Gouraya la patronne de Bougie n’aurait rien de fortuit. Pour le moment, on peut à coup sûr, avancer que le nom de Cendrillon, personnage des contes populaire, va s’apparenter au nom d’un personnage présumé historique donc réel dans la mythologie arabe ou arabo-musulmane (la plus récente des religions) : Fatima-Zahra. Ses origines, à mon avis, il faudra aller les chercher en Egypte ancienne et dans sa mythologie. Le moment de chance (Zahr), le premier nom Fatma, le moment du matin (s’hour ?, ou temps d'avant la première prière ?), la zohra en masri/arabe qui se retrouve ailleurs en russe sous la forme zola [zalâ] pour la « cendre » et zolouchka « cendrillon » sont autant d’indices primaires qui corroborent cet hypothèse de travail. Pour le cas de notre ville des Lumières, la capitale kabyle Vgayeth-Bougie, sa sainte patronne « Yemma Gouraya »en kabyle est peut-être comparable à « Fatima-Zahra », à Cendrillon, à Mercure. A suivre donc.
TERRE KABYLE
Cap maintenant vers la Kabylie profonde et retour à ce que l’on a dit dans le billet précédent au sujet du « binaire toponymique kabyle ». Mais d’abord cette supposition un peu risquée : la fête kabyle qui correspondrait à la Chandeleur serait peut-être la fête du partage dite thi-meshre-dt ou Timechret (le nom est quasiment « mercure », le synonyme tha-souiq-th fait clairement allusion au Souk = marché) que les que des terroristes hillaliens ont essayé d’interdire récemment à Tixeraïne (ils peuvent imposer leurs lois sur notre territoire !). Ensuite, on comprend que notre toponymie et même notre histoire vont dans ce sens.
Cours d’anglois jadis au lycée à Tizi, un classmate commença à lire son récit en anglois sur le terroir, sa région d’origine : « Ath Mesvah behind Ichardhiwène… », un expression qui me fait toujours sourire. Toujours est-il que ce couple de 2 villages Ath-Mesvah « dominant » – on les appelait les « Irlandais » pour le nombre élevé de rouquins chez eux, mais aussi pour leur « niya », des Kabyles vielle école, mais alors very old school !, des hommes justes, solidaires mais bagarreurs aussi – et des Ichardhiouène, village « affilié » confirment l’hypothèse du « binaire toponymique kabyle », développée dans le billet précédent. L’intérêt est dans le nom des ces deux villages : Ath Mesvah renvoie au Chandelier dit L’mesvah, un emprunt au masri/arabe mesbah et au Svah « matin » aussi un emprunt au masri/arabe sabah « matin », voire même le nom de la reine de Saba.
L’emplacement de ce village Ath-Mesvah indique clairement la matinée, càd il serait probablement entre le Nord et le Nord-Est ; ou bien ça serait le moment où Mercure apparaît dans le ciel avant le lever du Soleil. Logiquement, si les Ath-Mesvah sont un Chandelier, leur village-frère ou affilié i-shardhiwen , disons « les soldats » ou« les sardes » en qlq sorte pour faciliter sa perception aux francophones non-kabs (c’est juste pour mémoriser, d’accord ?) va désigner le contenu du chandelier : chandelles/cierges/bougies ou cire et mèche. Ce nom pluriel des Ichardiouène aurait pu se décliner i-sardhunen « les mulets », et il a pris une autre forme en Kabylie, toujours au pluriel : i-sheridhen (« dh » emphatique) ou Icheriden.
C’est le nom du champ (de bataille) kabyle par excellence. Rien qu’à l’évoquer, thassa thurwed asemidh « le foie (d'habitude chaud) est de glace », càd que l’âme kabyle frémit et devient de glace. Un certain 24 juin 1857 perdit la bataille face à l’armée française de Randon. La Kabylie y a surtout perdu son indépendance qu’il lui tarde de recouvrir, mais pas son honneur. Et le moment est venu de faire la part des choses, de séparer l’histoire réelle des légendes qui l’accompagnent.
L’histoire de cette bataille est attestée et indiscutable, par contre les noms de deux héros de cette épopée seraient, comme je suppose, des noms inventés, légendaires, tout simplement des « noms de guerre ». Lalla Fadhma N’Soumeur, surnommée la « Jeanne d’Arc » kabyle par les Français, digne héritière des Imravdhen kabyles os blanc et clean (à la différence des usurpateurs d’origine maure, perfides et roublards, qui se font passer pour des Kabyles), nobles et défenseurs de la patrie kabyle, demeure le symbole par excellence de la résistance du pays Kabyle à l’occupation. Son compagnon était un certain Boubaghla. Ce couple retombe dans le binaire kabyle ! La relation « chandelle-cheval (équidé) », Mercure ou Fatima-Zahra (Fadhma N'Soummeur en kab ?), cheval vs Jésus évoqués plus haut dans le texte, sont aussi valable pour le couple Fadhma n’Soumeur et Boubaghla, où Fadhma serait « bougie, chandelle, cierge » qui commande ou motive le soldat-mulet (a-sardhun en kab, c’est aussi dans Saldae l’ancien nom de Bougie), au nom arabisé bou-baghla « l’homme à la mule ». Soumeur pourrait être une autre forme de la shum3a « bougie » emprunté au masri/arabe.
Le toponyme Icheriden date-t-il d’avant cette bataille ou serait plutôt un nom symbolique après la défaite ? Sa signification se retrouverait dans le nom de la fête du partage (et du sacrifice ? en effet, un bœuf est sacrifié) Timechret lorsque la viande est répartie également en rangées ou sillons, comme une armée de soldats. Le nom de lieu Icheriden pourrait signifier le « champ de bataille », le « champ d’honneur » ou bien il serait en rapport avec ceux tombés au champ d’honneur : icheriden seraient terme kabyle clean équivalent du terme imjouhadh en kab pollué par l’arabe moujahidine « combattants du jihad » (sans doute un truc piqué en Egypte ancienne). Ou bien icheriden seraient une notion marchande (étalages, rangées, etc.) au vu de la relation avec Mercure.
Si le soldat (mulet, brêle) Boubaghla est la cire, Fadhma N’Soummeur serait alors la « mèche » de la bougie qui brûle : c’est elle la fière chandelle kabyle, c'est sa mèche qui entretient la flamme kabyle.
Espérons que la Kabylie verra une réincarnation de Lalla Fadhma N’Soummeur pour bientôt et pas seulement à l'écran (photo de la comédienne franco-libanaise Laëtitia Eïdo ayant incarné Fadhma N'Soumeur dans le film correspondant ; elle a appris le kabyle, bravissima et mes hommages, Lalla (Madame) !), pour que le jour se lève enfin sur le pays Kabyle et que notre Cendrillon, de Bougie-Alexandrie sans doute, puisse enfin délivrer la terre Kabyle de la condamnation à maure. On attend, on perd patience... Vivement le Mercury Rising ! Let’s roll, bordel !