Alger la radieuse, Alger la blanche. Après une interprétation très hard, sulfureuse je dirais, du billet précédent « Kaiser Sosie », voici, aux antipodes, une interprétation soft, angélique je dirais, de la dimension cachée de la ville d’Alger qui va lui redonner son lustre des jours meilleurs.
Dernièrement je suis tombé sur un os. A la lumière du « binaire kabyle » ou « punico-berbère » Tizi vs Agadir (et Alger aussi), j’ai cru comprendre que le symbole de la ville « dominante » (Agadir, Alger) devait être forcément un oiseau noble, donc un oiseau de proie (i-ghuidher « aigle » dans Agadhir) comme le veut la mythologie, kabyle surtout. Et ça doit être une femelle. Mais comment s’appelle la femelle de l’aigle ? Si le mythique prince des oiseaux L’vaz, supposé être un « faucon », a comme femelle et épouse la légendaire Thanina « faucon femelle », i-guidher, agelidh ledhyur , l’aigle « roi des oiseaux » n’en a pas… ni en kabyle, ni en latin (français). Pourtant, c’est justement cette femelle d’aigle qui serait le symbole de la ville dominante Agadir, Alger.
Heureusement qu’on a des solutions. Cette opposition Tizi vs Agadir (Alger) va aussi se décliner sous la forme d’une autre dualité : (pouvoir) Temporel vs (pouvoir) Spirituel pour, respectivement, Tizi vs Alger. Le saint patron d’Alger, Sidi Abderahmane, étant un produit kabyle formé aux Ath Waghlis et à Vgayeth-Bougie. Ainsi, quand une femme kabyle allait jadis de Tizi à Alger, elle devait se mettre à la mode algéroise et vêtir un hayek ou haïk « voile blanc », et l’enlevait à son retour à Tizi. C’était la règle d’éthique de l’époque, mais depuis ça a changé. C’est-à-dire que le symbole d’Alger, l’oiseau rare (une femelle) que l’on cherche !, aurait une dimension spirituelle. La logique nous dit que ce serait une Colombe ou une Tourterelle pour sa symbolique (le Saint-Esprit chez les voisins du nord), sa couleur (blanche comme Alger) et son voile blanc comme le hayak algérois. La femme algéroise ressemble one ne peut mieux à une Tha-milla « tourterelle » en kab, à une H’mama « colombe » en argot arabe algérois. Le hayek serait probablement comparable au duvet blanc, tiède et doux d’une colombe. C’est un symbole d’angélisme probablement, avec une odeur de sainteté qui plane sur la ville d’Alger :)
Pari risqué mais je m'y aventure quand même : El-Bahdja (Alger la "radieuse") serait une altération ou une autre forme de Paix, Pax en latin/romanes. Ne parle-t-on pas d'ailleurs de religion de paix à Alger ?
La symbolique spirituelle de la ville d’Alger repose entièrement sur les frêles épaules d’une colombe, de la femme. C’est elle la femelle de l’aigle que l’on cherchait, une vierge et/ou une fidèle. On comprend qu’Alger soit appelée la Blanche, mais pourquoi la Radieuse (el-bahdja en arabe algérois) ? Et là on retombe sur les mythes anciens, kabyles en tout cas. La « radieuse » serait avant tout en relation avec la lumière, on est d’accord, et dans le cas de la « colombe » d’Alger, la « radieuse » serait l’arc-en-ciel, soit th-isly-th (Tislyt), la mariée/fiancée du dieu Anzar, une tradition toujours préservée en Kabylie et chez les autres Berbères dans une moindre mesure. La femme kabyle portait jadis le « voile » seulement à deux occasions : pour ses noces (le « voile de la vierge ») et lorsqu’elle allait à Alger.
Le nom d’Alger est un nom de oiseau noble et de haut vol, un Tyr (terme usagé tant en kabyle qu’en masri/arabe, et peut-être en grec Ptéro). C’est aussi un nom de femme, peut-être de Vierge Marie et d’Aphrodite en termes équivalents en usage chez les voisins du nord. Maintenant qu’Alger est toute de blancheur, de beauté et de finesse, revoyons la fabuleuse image du janissaire évoquée dans le billet précédent (viril, brutal, soudard) sous un angle de vue plus raffiné, càd qu’il faudra sortir le porteur de cuillère de la caserne et l’habiller en civil :). Ou bien donner carrément une version féminine à ce tableau, càd en remplaçant les hommes par le femmes, le chorbadji par son épouse.
Lorsque je mentionne le nom espagnol d’Alger, soir Argel [arkhel], ce n’est pas pour rien : l’espagnol est l’avant-dernière langue romane à avoir influencé les langues nordafes et elle colle à l’époque maure et « turque » médiévale. Donc RGL en espagnol serait proche du terme usagé par les maures, en masri/arabe ou en dialecte. Si le G de /RGL/ devient un « kh » en espagnol, il va être un « S » en arabe. Observez le chorbadji porteur de cuillère et chef-guide des janissaires sous un œil « civil », spirituel. Qui est-il vraiment ?
Un Messager.
RSL en masri/arabe pour Rassoul « le Messager » et rissala « le message ».
On voit clairement qu’il y a une double interprétation de cette image : civile ou martiale ?, temporelle (martiale, virile) qui donne un Roi (un Mari ?), un Janissaire, etc. et spirituelle (humaniste, féminine) qui donne un Messager, une vielle tradition chez les hommes amateurs de mythes sur les « messagers des dieux » (Hermès par exemple).
Mais quel est le message porté par ce messager ? La bonne nouvelle ou/et la paix, sans doute pour une nouvelle ère, et forcément la parole des dieux, le verbe tout simplement, les Lumières, les Ecritures.. Il suffit de changer d’ustensiles sur ce tableau pour en déduire des choses ô combien intéressantes. Une tasse (afendjal en kab et en masri/arabe) à la place de la cuillère du messager et un plateau (sniwa en kab, senwa ou siniya « chinoise » en daridja) à la place de la casserole portée par ses compagnons et l’on aura … les Evangiles, c’est presque le titre de la légendaire chanson de la regrettée Nna Cherifa : Sniwa dh'ifendjallen, dheg udhrar id ughalen « un plateau de tasses (remplies pour le cortège) de retour de la montagne (du Djurdjura) ». Les ustensiles - attributs du chorbadji sur ce tableau ou de tout autre message vont constituer des indices cruciaux pour déchiffrer les mythes élevés au rang de dogmes chez les religieux.
On disait dans le billet précédent que l’Algérie est en souffrance pour cause de fuite de cerveaux. Je vais le formuler autrement : Il y a de moins en moins de Chorba (soupe algérienne, nordafe) à Alger, en Algérie, reste plus que la hrira des maures :)) Explications. L'ustensile récipent c'est fait pour contenir. La casserole est le crâne. La Chorba est tout simplement le Cerveau. Et de un. Le Cerveau symbolise l’Homme, l’être humain par excellence. Et de deux. C’est aussi de l’Argile, l’homme est (de poussière et) d’argile selon les mythes et religions : en kabyle LG est dans allagh « le cerveau » et dans on féminin tha-llagh-th (talaght) « l’argile », c’est aussi dans argile, Argel [arkhel] pour Alger et Angel [ankhel] « ange » en espagnol, ce qui donne un nom feminine précis à Alger en masri/arabe: Malika « Angélique » (en grec, terme "ange" introduit par notre Apulée de Madaure ; de nos jours seule la langue tamacheq a conservé le sens aneghlus "ange", en kabyle nghel signifie "verser, déverser", on est dans le Verseau). Et de trois. Et finalement, c’est aussi la symbolique de l’Argent (métal), qui curieusement est le seul métal usagé (avec du corail incrusté) par les Kabyles, et dans une moindre mesure chez les autres Berbères, en bijouterie alors que l’entourage immédiat et lointain (les vrais arabes d’Orient et d’Arabie) préfère l’or. Un petit passage en revue du lexique correspondant dans différentes langues permet de conforter cette hypothèse de travail. Sauf que...
Non, cette fois, c’est fini. On va se limiter désormais à la Kabylie et à ses intérêts. Alger la blanche, la radieuse, l’angélique qui n'est plus argentine et refuse d'assumer son intelligence, sa féminité, sa kabylité devra dorénavant se débrouiller toute seule pour lire dans sa mémoire et se projeter dans le futur. On la quittera sur un message de paix tout en espérant que ses maîtres actuels laisseront en paix la Kabylie et ses Saints. Le divorce est consommé, alors... Enfin bref, un joli morceau de musique avec un titre évocateur leur permettra peut-être de méditer ce message de paix qui se veut être un message clair : l’âge d’argent - l’âge kabyle d’Alger est révolu.
Hasta la vista, l’Angèle !
P-S
Plus de doutes, le nom Malika en sémitique-arabe (Angélique pour le nom d'Alger) serait comparable au nom de la vierge : Marie, Maria (Myriam en masri/arabe).
Hasta la vista, Maria !