1985-2015, Kabylie – Russie : Le champ de ruines
Délicate mission que d’essayer de visionner sa propre rétrospective sans s’éviter la coupe amère. Il le faut pourtant, se regarder en face, quitte à boire le calice jusqu’à la lie. Les paroles poignantes de ce chef-d’œuvre issu du dernier album du regretté ciseleur du verbe kabyle Dda Lwennas (La croisée des chemins), je les fais miennes, du moins en partie, surtout celles des refrains. Il ne s’agit pas de s’attendrir sur son sort ou qlq chose dans ce genre, non ; on est dans une autre dimension que peu de gens hélas saisissent. Nourrir des regrets est le propre de l’homme, c’est encore plus vrai pour ceux qui sortent du rang et de l’ordinaire. Quand les réponses correspondent à tout sauf à l’énoncé, il y a de quoi avoir le blues…
(Interprétation libre)
Le temps passe, la santé s’en va par le même chemin,
Et la vie qui ne nous apprend jamais rien,
Avec son lot de mauvais choix et d’illusions,
Aux pauvres rêvasseurs sans repères que nous sommes,
Vieux avant l’âge contemplant leurs champs de ruines.
Espoirs ruinés, illusions perdues,
La fuite en avant,
Souffler sur son propre brasier,
Histoire d’ébranler son âme,
Etrange empressement de courir à sa perte,
Comme si l’on y voyait son tremplin,
Vers le monde tant rêvé,
Loin de l’ordinaire,
De la banalité,
De ses « gens de bon sens »,
Et de ses marchands de désirs et de bonheur tangible.
Planqué comme un chasseur,
Au clair de lune,
Une vie durant,
De grande attente,
Les yeux avides de lumière rivés vers les décombres,
Vers la porte sublime,
Qui donne sur la cour des miracles,
Dans l’espoir de l’entrevoir un jour, Elle,
La moitié tant désirée,
La moitié immortelle.
Force est de s'avouer vaincu :
Les pieds dans les cendres, la tête dans les nuages.
Le champ de ruines,
Le grand gâchis.
Un beau désastre...
P.S.
Run !
Run, bordel !