Rassemblement, culture et démocratie en
Kabylie.
On entend dire que les « Grecs anciens
ont inventé la démocratie… ». Que les « Romains ont inventé le monde
(moderne … ». Que n’a-t-on pas entendu dire ! En somme, la démocratie
est brevetée, le monde aussi :)) Mais au-delà des institutions, des écrits et
des vielles pierres comme témoins de la parenté de ces « inventions »
(d’une nation ou d’un Etat, grec et romain en l’occurrence), il devrait y avoir
des indices objectifs en dehors de ce cadre officiel. Autrement dit, la
Démocratie doit avoir une mémoire populaire et se manifester dans l’organisation
sociopolitique, les us et traditions d’un peuple (méditerranéen).
Il existe sur la rive sud de la Méditerranée
une contrée pas comme les autres appelée la Kabylie, dont le patrimoine immatériel
est très probablement le plus sous-estimé et le moins bien compris et
interprété. Les gens comprennent facilement qu’un hiéroglyphe (égyptien) ancien
est un élément complexe (une écriture, un alphabet) qui doit être déchiffré, ce
qui a été fait par le grand Champollion ; mais à peine s’ils accepteraient
de loger à la même enseigne des éléments plus simples en apparence (familiers
tout simplement) comme c’est le cas pour la tradition orale kabyle, qui de plus
n’est pas assortie de richesse matérielle pouvant susciter l’intérêt des « grands
cerveaux officiels ». Le pire dans notre cas, c’est que les Kabyles
eux-mêmes ont un regard « scientifique » étranger (influence de l’école
occidentale/française et orientale) sur leur patrimoine. Le meilleur est que
les Kabyles ont perpétué et sauvegardé leurs traditions méditerranéennes mieux
que beaucoup de leurs voisins, et cette mémoire populaire kab a de quoi secouer
les thèses officielles notamment au sujet de la démocratie…
Transcrire l’oralité (la langue) et
interpréter correctement le patrimoine immatériel ne serait-ce que pour mieux
les comprendre, et aussi une façon de nous mettre à pied d’égalité des nations
modernes, est un chemin semé d’embûches, et la majorité a tendance à tomber
dans la facilité, surtout que ces « chercheurs » sont des casseurs
impatients avec des objectifs politiques surtout, ce qui ne fait que
dévaloriser notre patrimoine et affaiblir notre socle identitaire. Il n’y aura,
à mon sens, jamais d’écriture kabyle authentique tant que l’on n’a pas décrypté
notre oralité, notre organisation sociopolitique, notre toponymie, l’histoire
de notre langue et de notre patrimoine immatériel. C’est un passage obligé qui
requiert une approche globale et du temps.
Il existe une tradition purement kabyle dite
Thi-meshre-dt (Timechret, Timecret), qui est organisé non pas annuellement mais
occasionnellement, je crois, ou bien une fois tous les 3-4 ans (à vérifier). C’est
la fête du partage, de l’égalité entre les concitoyens et membre de la même communauté
(village-Etat). On procède au sacrifie solennel d’un taureau (bœuf) pour
consolider les liens entres les citoyens. Mais c’est le rituel de partage qui
consiste le fond de cette ancienne tradition kabyle : la viande est
répartie de façon plus ou moins égale en plusieurs lots (un lot par famille) sur
plusieurs rangées (Photo), chaque père de famille doit préparer,
sculpter sa tige de bois en cachette (avec son décor, un blason familial en qlq
sorte) pour la reconnaître au moment où l’arbitre (le sage) procédera à la
répartition de thi-seqarin (courtepaille), les tiges de tous les pères de famille
sur les lots de viande. C’est une leçon d’égalité, de fraternité, de partage et…
de démocratie. C’est une preuve même de démocratie, car, chers amis, le nom
même de cette tradition kabyle est, à mon sens, on ne peut plus évocateur :
Timechret (fête du partage kab) ~ Démocratie
C’est plus qu’une hypothèse, c’est une
conviction d’autant plus que notre système sociopolitique est une démocratie
méditerranéenne classique. Cette tradition populaire kabyle est un aussi un
artefact, une alternative à la version officielle dominante de la rive nord du
Grand Bleu qui attribue exclusivement aux anciens Grecs la paternité de la
démocratie.
Techniquement, ou linguistiquement si vous
préférez, ce sont les affiches du féminin (Th ou T) en kabyle qui doivent être
étudiés puis comparés aux formes plus familières en grec/latin (façon de
comparer notre patrimoine oral à leur patrimoine écrit) pour en tirer des
enseignements enrichissants pour tous. Par exemple, le Th ou T kab en préfixe
équivaudrait, dans certains cas, au D grec/latin : le terme kab tha-zeqa (TZQ :
résidence, habitation), que l’on a dit être un Zodiaque, va prendre la forme
grecque/latine DSQ, c’est-à-dire un Disque, ce qui corrobore la thèse de
zodiaque sur la forme !
RCD. Timechret est donc Démocratie.
Autre
tradition, tha-shemlith (Tachemlit, Tacemlit) « volontariat », on l’a
dit il y a des mois déjà, serait simplement un Rassemblement. La Culture, elle,
tout comme le culte d’ailleurs, est tout simplement un cycle, un tour :
thi-kelt « fois, tour » (synonyme avridh) ou DR de der/thadart « village »
(Daleth phénicien, le terme kab idles « culture » pourrait être un « enseignement),
par exemple, voire même le nombre 10 (c’est lui le cycle, fois) qui est d’ailleurs
le nom taachurt (Achoura) d’une autre tradition pas exclusivement mais surtout
fêtée en Kabylie.
Là nous avons des termes kabyles authentiques et ancrés dans
nos traditions pour désigner les fondements de notre société, entre autres, le
Rassemblement (du peuple), la Culture et la Démocratie : tacemlit,
thaacurt (thikelt ?), timecret. Comparez-les maintenant aux néologismes
berbéristes du RCD (agraw-yidles-tugdut) et vous verrez le gouffre qui sépare
un travail de longue haleine et le bricolage de casseurs impatients. On doit
être patients en démocratie :)) Ces traditions kabyles sont des institutions,
et il ne faut pas les folkloriser pour la simple raison qu’elles ne sont pas
personnalisées physiquement par des monuments de vielles pierres ou des
établissements bourrés de mandarins « immortels », maîtres de l’écriture
et de l’histoire donc, censés incarner la suprématie des uns sur les autres. On
n’a pas dit notre dernier mot, ils sont prévenus :))
Etymologiquement, démocratie viendrait du grec
demos « territoire, peuple » et kratein « commander », sauf
qu’en grec ancien demos découle du terme… daiesthai «
partager ». La fête du partage kabyle thi-meshret (Timecret) est bien la
meilleure illustration de la démocratie méditerranéenne authentique.
Deux questions restent à
élucider :
1. Le taureau sacrifié pour le
rituel de timechret-démocratie serait-il un indice calendaire (signe du taureau
traversé par le soleil) ?
2. Apis, le taureau sacré des
anciens égyptiens serait-il un indice-passerelle menant à une probable
démocratie égyptienne ancienne ?
A prochainement !