Epi de Vierge ou Lumière des Justes.
L’histoire peut-elle l’emporter sur l’imaginaire collectif avec ses
icônes ? A peine ! D’ailleurs, une histoire pourrait en cacher une autre
comme nous allons le voir, surtout lorsqu’il s’agit d’histoire écrite
par le vainqueur, donc non homologuée par le vaincu, avec le lot de
doutes qu’elle soulève. Un autre regard sur la bataille d’Icheriden de
1857 et sur la « Jeanne d’Arc kabyle » (dixit le maréchal Randon), Lalla
Fadhma N’Soumeur.
Pour faire bref, la bataille du 24 juin 1857 à Icheriden marque la chute d’une place forte kabyle, Larvaa Nath Yirathen (Fort Napoléon puis Fort National) et la soumission de la Kabylie par le rouleau compresseur colonial français. C’est, pour nous Kabyles, l’année de la chute telle la chute de Troie, comme un chapitre de l’Iliade ; le jour du désastre, le Jour du Jugement dernier ; vous comprendrez plus loin pourquoi.
TRAD
Guerre et paix vont de pair, leur lexique aussi. Le terme Tradh (guerre, conflit armé) en kabyle explique à lui seul notre histoire profondément méditerranéenne, et en particulier, le toponyme Ath Yirathen :
Tradh (guerre) en kabyle ~ Trident (de Poseidon)
Deux autres termes en découlent en kab :
Iredh = épi de blé, blé
Ayradh = lion
Bref, les céréales vont s’apparenter aux armes. Exemple de cette image de cette combattante kabyle à la bataille d’Icheriden, qui tient de la main gauche un pistolet (tha-meziant, kaboussa en argot dz) et de la main droite un fusil (tha-mug’halt ou tha-muk’halt, mokala en fr.). En temps de paix, cette femme tiendrait un épi d’orge (thimzine) de la main gauche et un épi de blé (iredh) de la main droite. On comprend ainsi que matraque en fr. issu de l’argot dz matrag (gourdin) serait matrad (mitraille ?) ; ce même gourdin en kab serait adebouz qui est aussi le pouce et sans doute symbole de pression et canon (arme). On reviendra plus en détail sur ce sujet une autre fois.
JOURDAIN
On a vu récemment, dans le billet « La Suisse sauvage », l’étrange intrusion des noms des fleuves Tigre et Euphrate dans l’espace-temps linguistique kabyle, le mont (adrar) étant aussi une notion de temps comme on l’a dit. Nouvel élément allant dans ce sens : Irathen dans Ath Yirathen donnerait le fleuve lion, le Jourdain, urdun en arabe et yarad (rivière du Jugement) en hébreu.
VIERGE
Mais on peut aller encore plus loin dans le temps en adoptant une version de paix de cette image de guerre de la bataille d’Icheriden. Il s’agirait tout simplement de moisson de céréales à un moment bien précis : les jours du Solstice d’été, qui il y a 8 600 ans, se trouvait dans le bas de la constellation de la Vierge, dans la Balance. Par ailleurs, le culte de Mithra comme d’autres cultes anciens pourraient être porteurs d’excellents éléments de réponse. Cependant, on va nous concentrer sur un temps plus proche de nous, à l’an 1857, au solstice d’été de 1857, qui commença le dimanche 21 juin 1857 et dura aussi le lundi 22 et le mardi 23 (trois jours « stationnaires » de lumières et de moisson ?), et un certain mercredi (yarva ou larba de « quatre » en masri-arabe) 24 juin 1857 a eu lieu la Bataille d’Icheriden. Larba n’Ath Yirathen s’explique.
Comparez cette photo de la combattante d’Icheriden et celle-ci montrant une figure céleste - la constellation de la Vierge, et vous aurez tout compris de la dimension de la « Vierge » kabyle, Lalla Fadhma N’Soumeur. L’épi de la vierge est sans doute ce qui expliquerait la légende de l’épée de Jeanne d’Arc chez le Français, et leur toponyme Orléans devra naturellement s’apparenter au Jourdain, au nom de lion Ayradh (Ath Irathen en Kabylie), tout comme leur Fort National serait un fort « stationnaire » ; Napoléon dans Fort Napoléon (Ath Yirathen) avec le « leo » de lion nous incite à vérifier son origine . NB : Le solstice de la Vierge est reflété ailleurs mais tout autrement, chez les Slaves, par la fête du solstice dite fête d’Ivan Kupala. C’est l’été de la Vierge ou des vierges, sans doute pour amour et mariages. Par ailleurs, l'épi de la Vierge expliquerait que la Vierge soit associée à la maison du pain, Bethleem ? A suivre.
La photo d’illustration est tirée du film algérien – il faut le souligner – « Lalla Fadhma N’Soumeur » ; je pense qu’elle reflète on ne peut mieux la légende multiséculaire qui se cache derrière cette héroïne moderne : peut-être que N Soumeur n’est que la variante kab de Santa Maria, mais c’est surtout la référence au symbole kabyle, l’olivier (a-zemmur), et au lion (izem), ce qui laisse penser que le préfixe Yarva ou Larba dans Larba Nath Yirathen (ex. Fort National, Fort Napoléon) serait apparenté au terme latin/rom. olivier avec altération du L en R pour la version supposée masri-arabe arbaa (quatre). L’olivier, la lampe à huile d’olive kab, ne fait que conforter cette hypothèse de « vierge » kabyle pour Fadhma N’Soumeur qui tient la flamme kabyle, la lumière des justes …
Je vous laisse avec feu Dda Lwennas avec un titre évocateur.
A prochainement !