Cirta ou La Meule Providentielle.
Préambule
L’odyssée de l’humanité est un sujet palpitant
que chacun imagine et raconte à sa façon. Mais une chose les réunit tous :
l’humanité, longtemps accablée par sa condition et terrifiée par la faim, a
toujours rêvé d’opulence par les temps de disettes et tout simplement d’un
avenir meilleur, du moins dans son imaginaire avec son Dieu (ou ses dieux)
bienfaiteur(s), son paradis, sa manne céleste, ses miracles dont seuls ses
adorateurs, à en croire leur baratin, en sont bénéficiaires. La manne céleste
qui tombe du ciel dans sa version des « camarades » religieux est un
miracle que seul un esclave peut avaler, lui qui a l’habitude d’attendre
récompense de la part de son maître et seigneur. Dans les mythes kabyles, avec
son « gain magique » et son riche monde fabuleux qui a bercé notre
enfance, la version de cette manne céleste est tout autre (celle que ma mère
m’a racontée quand j’étais enfant) : c’est un père de famille, nombreuse on
présume, qui un jour trouva par hasard, donc par chance, une Thi-sirth (meule,
moulin) fabuleux, un vrai cadeau de la providence : il suffisait
d‘introduire un grain de blé (iredh, irdhen) dans ce meule, et le meule-machine
se mettait en marche et il en sortait de la farine de blé (awren) sans arrêt.
777 ! le jackpot quoi ! Ce père de famille put longtemps nourrir les
siens avant que la chance ne lui reprenne cette Thi-sirth, la meule à grains merveilleuse
(équivalent chez les « camarades » orientaux : la lampe
merveilleuse avec son djinn ?; chez les Russes : le poisson
d’or ?), et retour à sa condition d’humain qui doit cultiver sa terre et
travailler dur pour avoir du blé dur, car les hommes sont comme les clichés
qu’ils inventent : ils ont la vie dure :))
Cette meule à grain providentielle des contes
kabyles symboliserait on ne peut mieux le destin de l’humanité, la sédentarité
puis la civilisation et c’est, tenez-vous bien, le symbole par excellence de
l’antique capitale numide, Cirta, rebaptisée depuis Constantine, Qsantina en DZ
de nos jours. Ironie du sort, Constantine, par ailleurs très cosmopolite, avait
plutôt la réputation d’être une cité hostile aux Kabs, du moins durant les
années 80’, la propagande anti-kabyle de l’Etat et du clergé (habous) algériens,
et de ce fait, il était (est ?) fortement déconseillé aux Kabs de s’y
aventurer. C’est juste une idée reçue, peut-être, et cela ne signifie point
qu’il n’en reste plus de gens honorables et authentiques à Constantine, loin
s’en faut. Toujours est-il qu’un tour à Cirta la numide est fortement conseillé
car très instructif, et sans danger pour les Kabs :))
CIRTA
Voici à quoi ressemble Constantine de nosjours sur fond de musique Cirtaky :))), le maalouf constantinois
quoi ! Un style andalous prédominant (c’est le cas à Tlemcen aussi, à
l’ouest du pays), un genre non pas populaire comme c’est le cas pour le chaabi
à Alger et en Kabylie, mais de la musique bourgeoise, de la « musique de
chambre » de la cour.
Voici comment il faut désormais regarder
Cirta-Constantine, du point de vue d’un ingénieur : une meule à grain, ou
encore plus simple, un moulin à café mécanique. C’est bon ? On continue
alors.
C’est à travers cette image de Thi-sirth (tissirt) meule à grains ou moulin
à café manuel que l’on va comprendre le nom punique QRT de Cirta dans toutes
ses dimensions. Comme vous allez le voir, la meule merveilleuse des contes
kabyles (ou la « machine de Cirta ») est une excellente machine à
remonter le temps !
Je vais reprendre ce j’ai dit récemment sur
FB :
1) Numide, que les sources occidentales
(non-homologuées en Kabylie pour le moment) relient à « nomade » en
grec, serait à coup sûr en lien avec le latin Numisma (monnaie, pièce). La Monnaie serait indissociable du Meule, Moulin. Sordi (argent monnaie) serait lié à thi -sirt (meule).On a
une certitude : on est dans la cour de Cirta, la capitale des Numides = Numismates.
La monnaie, c’est un attribut d’Etat par excellence. Les pièces carthaginoises
et numides de Cirta étayent cette hypothèse. Le mot clé correspondant :
thi-kelt (fois, tour – vuelta en esp., volta en it.) en kab. Lire le détail sur
FB ;
2) SR de thi-sirth (tissirt) « meule à
grain, moulin » va en fait se retrouver dans a-saru (assarou)
« cordon-ceinture de femme », tha-saruts « la Clef », et
aussi (mon hypothèse) avec la Soie et la Vis sans fin ou vis d’Archimède. Voir
le détail sur FB.
Ces racines SR et KL ne sont pas les seules
liées au nom de l’antique Cirta (QRT) : QR de aquran, amuqran « dur,
grand », issu de la tête (aqerru), comme dans l’unité de volume de
céréales aqarwi (la livre punique ?) toujours en usage dans le Pays Kabyle
comme dans le Pays Chaoui l’est aussi. Je vais vous épargner toutes les
hypothèses recevables possibles, on se limitera aux plus éclatantes :
-Cirta est notre Odyssée (punique,
libyco-punique, numide), la version grecque vous la connaissez probablement
(Odyssée d’Homère). En d’autres termes, une Chronologie ;
- QRT de Cirta est dans QRT.HDST de Carthage
que ces camarades nous disent être (seulement) la « ville nouvelle ».
Souvenez-vous, les vieux briscards, je disais 7 ans en arrière, que Carthage
serait la « Terre promise », et là je confirme :
QRT de Cirta est la Terre : ce qui
expliquer le lien avec KL en kab (akal « sol, terre ») et son
équivalent sémitique (arabe, hébreu) n’est pas avec un gutturale Q mais avec le
coup de glotte ou alpha : Ardh (terre) en arabe, eredh en hébreu et… Earth
en anglois )). Et, on l’a dit depuis longtemps, c’est aussi l’Art. On fait la
synthèse : QRT de Cirta et Carthage, c’est Terre, Art et, par extension,
articulation, artisanat, production, industrie, etc. Vous comprenez pourquoi le
lien avec Thi-sirth (meule à grains, moulin) qui tourne comme la Terre ?
C’est qui le Carthaginois ? Un Artisan d’abord ! Un Terrien aussi,
donc un tellurique très attaché à sa terre. Et un Akli « esclave,
boucher » au sens d’artisan aussi (classement social chez les Kabs et les
Kel Tamacheq). Ceci est valable pour un Cirtadin :)), Constantinois aussi. Non,
Cirta-Constantine ne peut être ni arabe, ni islamique ne serait que pour la
simple raison qu’elle n’est pas plate )) : elle est ronde (sphérique) et
elle tourne. Vous avez entendu ? Cirta tourne !
- La cerise sur le gâteau maintenant.
Reprenons la « machine de Cirta » ou la meule merveilleuse des contes
kabyles. Imagions-là comme un simple moulin à café mécanique. On refait le
contre kabyle : on y introduit un grain dur (une baie dure) de café à
l’intérieur et on tourne la manchette pour transmettre notre énergie à la vis
qui s’ébranle et broie le grain pou nous donner de la poudre. Got it ? Ok,
maintenant ce moulin à grain, c’est simplement votre cerveau. Allez-y,
comparez, prenez votre temps pour réfléchir…
Cirta, c’est aussi ce qu’on a dans la
caboche : notre cerveau, c’est lui la vis sans fin (assaru), la
Clef ! Mais pourquoi al’lagh en kabyle et moukh en arabe pour désigner le
cerveau ? Brain « cerveau » en anglois est une déformation soit
de Grain, soit de Blé en français (Ah les perfides !). Le terme kabyle
iredh (épi de blé dur), irdhen au pluriel, est, je suppose, en relation avec
QRT de Cirta et serait équivalent au Ard/Erd (terre) en sémitiques, et en
germaniques (earth en anglois), à Art, artisanat, etc. La pensée, l’idée, la
réflexion doivent se trouver dans ce brasier de Carthage et Cirta.
- Cirta ne s’est pas évaporée, le terme douro
(rond, sou, 5 centimes DZ) est un « dur » (durum en latin) depuis
l’antique Cirta la « numismate », ne me dites pas que douro est
d’origine espagnole, car c’est ridicule. Notre machine de Cirta ou la meule
providentielle est un Sort (le « mektoub » ar.), une loterie aussi :
douro serait par excellence une pièce ronde avec un côté pile et un côté face
pour effectuer un tirage au sort (équivalent de thi-seqarin « courte paille »
pour le tirage avec des tiges en bois). Non, Cirta comme cité-Etat, symbole
d’une Nation, n’a pas disparu. L’histoire de Cirta prise par Marius et les
Romains durant l’antiquité va se reproduire 2 000 ans plus tard, lorsque
d’autres « romains », les Français en l’occurrence ont vaincu en 1857
la résistance des citoyens-soldats kabyles confédérés sur le champ de bataille
des Icheriden et ont pris par la suite le contrôle de la place-forte de cette
partie de la Kabylie : Fort-National (ex.Fort Napoléon) en français et
Larva Nath Irathen en kabyle. Le grain de blé dur est dans Cirta et Ath
Irathen, c’est le grain dur de la Nation en tant que telle. Ce grain dur et
magique est celui qui fait le lien entre ces deux époques, à coup sûr, surtout
qu’en plus de Vagyeth-Bougie, l’ex Fort-National (Larva Nath Irathen) constitue
l’autre place-forte, l’autre « cerveau de la nation » et le deuxième point
de départ de notre « reconquista », un tremplin et un vrai fort national
pour reconquérir notre histoire, notre identité et refonder notre Nation sur
des bases saines et en phase avec la modernité.
La raison voudrait que l’antique Cirta
(Constantine) et l’actuel Fort-National (Larva Nath Irathen) soient jumelées
pour que l’odyssée se poursuive et revenir dans l’histoire par la grande porte.
La réalité est telle que tout sépare l’actuelle Constantine de l’actuel ex.
Front-National. D’un côté une masse avilie de cosmopolites qui vit la
sublimation dans l’aisance et s’en remet au « mektoub » (destin, providence) en se diluant
dans un monde (si c’est le leur déjà !) condamné à l’échec puis à la
disparition, et de l’autre un peuple indocile moins nanti qui ne capitule pas
et ne veut plus être la risée du monde et joue sa survie. C’est bien ce dernier
qui fait vivre la flamme du brasier de Carthage et du caractère forgé à Cirta des
centaines de siècles en arrière. La Terre continuera son odyssée avec ou sans
nous. Notre odyssée dépend de notre volonté, car il n’y a pas de fatalité. Il
suffit de nettoyer la « machine de Cirta » des grains de sable à l’origine
de son blocage, et d’y mettre du grain de blé dur dedans pour qu’elle s’ébranle
de nouveau pour nous nous faire rattraper le temps perdu. C’est notre cerveau
collectif, avec ses deux hémisphères (pile et face de la monnaie), la clef du succès. A bon entendeur !
Postface
Le grain dur authentique (blé) a été remplacé
par un autre grain dur, celui de l’érosion : le grain sable de la
djmelsahrabisation (du désert intellectuel) qui bloque les rouages de la
« machine de Cirta », lorsque la razzia et la sublimation des
cosmopolites se substituent à l’odyssée intelligente des authentiques. La
« guerre des mondes » est garantie :
2017. Dialogue de sourds entre un cosmopolite
figé et un tellurique authentique en mouvement :
—Cirta ? Même pas Constantine !
C’est Qsantina (en arabe et en DZ – NDA).
—Xantina ? Why not !
—Constantine – capitale…
—Why not !!
—Constantine – capitale de la
culture…
—Why not !!!
—Constantine – capitale de la
culture arabe 2015.
—Nana-ak ! (Ta sœur !
l’aînée en plus ! en kab – NDA)
Le cosmopolite à l’identité approximative
n’est pas à une contradiction près. Razzia 2015 ou le patrimoine et la mémoire
de ce pays remis comme butin par le cosmopolite aux membres de son cartel.
Triste sort que celui de Cirta qui vit les temps morts, une machine qui ne sert
à rien sauf peut-être de gadget à des gens qui ne savent même pas s’en servir
surtout qu’ils ne savent pas lire le mode d’emploi :))) Le proverbe kabyle le
résume bien : yefka ad Rebbi irdhen i yir thugmas, soit « Dieu a offert
du blé dur à des sans-dents ». Y'a de
quoi se la mordre…